Résumé de l'affaire
Appel d'un jugement de la Cour supérieure ayant rejeté une demande d'autorisation d'exercer une action collective. Accueilli en partie.
Les appelants désirent être autorisés à représenter des résidants de la Ville de Brossard qui auraient été victimes d'ennuis causés par une circulation devenue trop dense sur le chemin des Prairies. Les inconvénients excessifs qu'ils invoquent et qui, selon eux, excèdent les limites de la tolérance seraient dus au choix des intimées, la Ville de Longueuil et la Ville de Brossard, de ne pas mener à terme le prolongement du boulevard Quartier malgré la réglementation et les approbations reçues en ce sens. La juge de première instance a rejeté tous les motifs de réclamation en se disant d'avis que le syllogisme juridique avancé n'était pas soutenu par les allégations de la demande d'autorisation ni par la preuve versée au dossier (art. 1003 b) du Code de procédure civile (C.P.C.) (ancien)). Les autres critères énoncés à l'article 1003 C.P.C. (ancien) n'ont pas fait l'objet d'une contestation; ils sont remplis.
Décision
M. le juge Levesque: L'article 1003 b) C.P.C. (ancien) se limite à établir que la demande d'autorisation doit être accueillie si «les faits allégués paraissent justifier les conclusions recherchées». En l'espèce, la juge a choisi de s'éloigner de l'enseignement de la Cour suprême dans Infineon Technologies AG c. Option consommateurs (C.S. Can., 2013-10-31), 2013 CSC 59, SOQUIJ AZ-51014011, 2013EXP-3509, J.E. 2013-1903, [2013] 3 R.C.S. 600, en décidant «d'emprunter sur le fond du dossier» pour justifier ses conclusions. D'ailleurs, en ce qui concerne le recours contre Brossard, elle s'est carrément livrée à un processus d'évaluation de la preuve en analysant les expertises et les autres rapports produits pour en relever les contradictions. Le rôle de la juge se limitait plutôt à constater, prima facie, le caractère soutenable du syllogisme juridique mis de l'avant par les appelants. En outre, elle a tranché le fond du débat en faisant siennes les positions énoncées par les intimées. Or, les allégations de la requête en ce qui concerne l'application de l'article 976 du Code civil du Québec (C.C.Q.) soutiennent adéquatement le syllogisme juridique des appelants. Toutefois, en ce qui concerne le grief relatif au retard injustifié dans la réalisation des travaux ainsi que la violation des normes de la Loi sur la qualité de l'environnement, aucune allégation ne fait état de la mauvaise foi de la Ville de Brossard. Ainsi, le recours envisagé à l'égard de la responsabilité extracontractuelle de cette dernière à ce sujet ne peut être autorisé. D'autre part, les allégations des appelants selon lesquelles cette ville aurait contrevenu aux articles 19.1 et 19.2 de la Loi sur la qualité de l'environnement et aurait porté atteinte de manière illicite et intentionnelle à des droits garantis par la Charte des droits et libertés de la personne sont suffisantes pour soutenir une potentielle violation de ces lois. Enfin, il est prématuré de rejeter, à ce stade, une conclusion de nature injonctive en raison de son imprécision.
Quant au recours dirigé contre la Ville de Longueuil, lequel n'est fondé que sur l'article 1457 C.C.Q. et sur la charte, la juge n'a pas commis d'erreur en constatant que celui-ci était prescrit, et ce, à sa face même. Le rôle de filtrage d'écarter les recours insoutenables ou frivoles qui était le sien, au vu de la procédure, a alors été judicieusement appliqué par la juge à l'endroit de la Ville de Longueuil.