RÉSUMÉ DE L’AFFAIRE
Demande en réclamation d'une somme d'argent (57 796 $). Accueillie en partie (24 142 $).
Les défendeurs ont retenu les services du demandeur pour exécuter des travaux à leur résidence secondaire. Ils ont ensuite résilié le contrat alors que les travaux n'étaient pas terminés. Le demandeur réclame le paiement de 2 factures, l'une pour les travaux réalisés et impayés au moment de la résiliation (14 487 $), et l'autre résultant de l'application de la clause pénale prévue au contrat (43 308 $). Les défendeurs soutiennent avoir exercé leur droit à la résiliation unilatérale sans motif prévu à l'article 2125 du Code civil du Québec (C.C.Q.). Leurs obligations seraient ainsi limitées à ce que prévoit l'article 2129 C.C.Q. Selon eux, le demandeur n'a subi aucun préjudice résultant de la résiliation du contrat. Quant à la clause pénale, si elle est applicable, les défendeurs prétendent qu'elle est abusive et doit être déclarée nulle.
RÉSUMÉ DE LA DÉCISION
Les défendeurs ont exercé leur droit à la résiliation conformément à l'article 2125 C.C.Q. Cette résiliation sans motif et intempestive a causé un préjudice au demandeur, qui, alors que les travaux progressaient, s'est subitement retrouvé dans l'obligation de devoir démobiliser son chantier sur-le-champ. Dans Gagnon c. Bell Mobilité inc. (C.A., 2016-09-20), 2016 QCCA 1496, SOQUIJ AZ-51324123, 2016EXP-3081, J.E. 2016-1664, la Cour d'appel a conclu que le droit de résilier unilatéralement et sans cause un contrat aux termes de l'article 2125 C.C.Q. n'emporte pas nécessairement l'application de l'article 2129 C.C.Q. Le droit de déterminer les dommages-intérêts par anticipation demeure. Ainsi, dans un contrat conclu de gré à gré, comme en l'espèce, le client qui a conservé la faculté de résilier sans faute peut quand même renoncer à l'article 2129 C.C.Q. et accepter une évaluation anticipée du préjudice. En contractant la clause pénale en litige, les défendeurs ont renoncé à l'application de l'article 2129 C.C.Q., lequel, tout comme l'article 2125 C.C.Q., n'est pas d'ordre public. Le préjudice résultant de la résiliation doit donc être évalué en fonction de la clause pénale. Les interdictions prévues aux articles 11.4 et 13 de la Loi sur la protection du consommateur qu'invoquent les défendeurs pour plaider la nullité de la clause pénale ne s'appliquent pas aux contrats visant la construction d'un immeuble. La loi a une portée à l'égard de contrats concernant la réparation ou la rénovation d'un immeuble mais, compte tenu de l'envergure des travaux entrepris (démolition, reconstruction et réaménagement de certaines pièces, dont l'ajout d'une chambre et d'une salle de bains), les parties n'ont pas conclu un tel contrat. Il ne s'agit donc pas d'un contrat de consommation mais bien d'un véritable contrat de construction échappant à l'application de la loi. De plus, les parties ont conclu un contrat de gré à gré. L'article 1437 C.C.Q., applicable aux contrats de consommation et d'adhésion, n'est d'aucun secours aux défendeurs. La clause pénale prévue au contrat s'applique. L'interprétation qu'en fait le demandeur est toutefois erronée, de sorte que le résultat de son calcul est nettement exagéré et doit être corrigé. Dans les circonstances, la clause pénale doit être interprétée et appliquée comme donnant droit au demandeur à une indemnité représentant 35 % des travaux «à effectuer» au moment de la résiliation et non 35 % de «la valeur du contrat». La pénalité de résiliation est donc réduite à 8 925 $. Le demandeur a également droit au paiement des travaux réalisés et impayés au moment de la résiliation (14 487 $) ainsi qu'au remboursement d'un dépôt de 729 $ qu'il a fait auprès d'un sous-traitant en cuisine.