La Dépêche

PROTECTION DU CONSOMMATEUR :  En raison des fausses représentations dont ils ont été victimes de la part de Groupe Laro Alta inc., les demandeurs sont en droit d'obtenir la résolution de la convention d'achat de vacances par intervalles qu'ils ont conclue avec elle; ils ont également droit à des dommages punitifs de 4 000 $ ainsi qu'à une somme de 750 $ à titre de dommages compensatoires.

CONTRAT : La clause du contrat de vente de vacances à temps partagé qui renvoie à un catalogue d'hôtels affiliés pour connaître la valeur des points d'échange est une clause externe n'ayant jamais été portée à la connaissance des acheteurs, qui obtiennent la résolution du contrat; en outre, dans les circonstances, la durée de l'engagement de ces derniers (39 ans) est abusive.

DOMMAGE (ÉVALUATION) : Groupe Laro Alta inc., qui a fait de fausses représentations aux demandeurs afin de les amener à adhérer à un programme de vacances par intervalles (vacances à temps partagé), est condamnée à payer des dommages punitifs de 4 000 $.

 

Résumé

Requête en annulation d'une convention d'achat de vacances à temps partagé ainsi qu'en réclamation de dommages-intérêts, de dommages moraux et de dommages punitifs (22 010 $). Accueillie en partie (15 510 $).

 

En 2013, alors qu'ils visitaient un salon de l'habitation, les demandeurs ont rempli un coupon de participation que leur avait remis la défenderesse, aussi connue sous le nom de Club Vacances, pour gagner un voyage dans le Sud. Un mois plus tard, les demandeurs ont reçu un appel les informant qu'ils avaient gagné un voyage mais qu'ils devaient assister à une séance d'information pour obtenir leur prix. Une représentante de la défenderesse leur a alors vanté les avantages d'un programme permettant de réserver des hôtels partout dans le monde en échange de points vendus par Resort Condominiums International (RCI). Elle leur a également affirmé que l'adhésion au programme permettait d'obtenir des rabais sur la location de voitures, l'hébergement et les billets d'avion et que les points pouvaient facilement être revendus. Les demandeurs ont posé beaucoup de questions, principalement au sujet des coûts, et la représentante a insisté sur le fait qu'il n'y avait aucuns frais cachés. Elle a également mentionné que les frais d'adhésion au programme étaient exceptionnellement réduits à 9 000 $ au lieu de 15 000 $ et que l'offre n'était valable que pour une journée seulement. Les demandeurs se sont engagés à payer 10 760 $ (taxes et frais d'administration inclus) pour obtenir 50 000 points par année pendant 39 ans. Ils devaient également payer des frais d'entretien annuel de 605 $, sauf pour la première année. Quant au prix qu'ils avaient gagné, il appert que le séjour d'une semaine proposé ne pouvait être effectué entièrement dans la même ville et le même hôtel, ce qui nécessitait un déplacement de plusieurs dizaines de kilomètres en milieu de semaine. En outre, des frais de réservation de 99 $ US non remboursables s'appliquaient et le certificat donnant droit au séjour était déjà expiré au moment de sa remise aux demandeurs. De retour à la maison, ceux-ci ont consulté le site Internet de RCI et ont constaté qu'ils n'obtiendraient pas les avantages escomptés. Ils ont voulu annuler le contrat, mais la défenderesse a refusé. Les demandeurs prétendent avoir été victimes de fausses représentations qui les ont empêchés de donner un consentement libre et éclairé. La défenderesse soutient avoir agi en toute transparence. Selon elle, le coupon-réponse rempli par les demandeurs indiquait clairement qu'il s'agissait d'une offre promotionnelle. Une mention inscrite au verso du coupon informait également le participant qu'une séance d'information sur le concept de propriété de vacances à temps partagé serait tenue.

 

Décision

Le contrat conclu entre les parties est un contrat de consommation. L'article 218 de la Loi sur la protection du consommateur doit servir de guide dans l'appréciation de la conformité d'un comportement commercial avec la loi. L'impression générale donnée par une représentation commerciale doit s'apprécier dans la perspective du «consommateur moyen», c'est-à-dire «crédule et inexpérimenté» (Richard c. Time Inc. (C.S. Can., 2012-02-28), 2012 CSC 8, SOQUIJ AZ-50834275, 2012EXP-836, J.E. 2012-469, [2012] 1 R.C.S. 265). Il faut également tenir compte du contexte dans lequel ce consommateur se trouve exposé à une représentation commerciale. En l'espèce, les comportements commerciaux de la défenderesse constituent des pratiques interdites au sens de la loi. Le consommateur moyen a l'impression générale qu'il peut gagner un prix en déposant son coupon-réponse dans la boîte, alors qu'il participe plutôt, à son insu, à une stratégie bien orchestrée de télévente. Cette invitation à déposer un coupon-réponse est en fait un prétexte visant à faciliter, par la suite, sa sollicitation téléphonique. Pourtant, en 1994, la défenderesse s'était volontairement engagée, en vertu de l'article 314 de la loi, à ne pas laisser «faussement croire ou entendre qu'un consommateur a gagné un prix ou a été sélectionné pour en recevoir un». Elle a également fait de fausses représentations aux demandeurs lors de la présentation du programme RCI, notamment en laissant entendre que les semaines de vacances inutilisées pouvaient être revendues facilement et sans frais. Elle a aussi prétendu qu'il était possible d'accéder gratuitement aux sites de Disney World, qu'aucuns frais d'entretien n'étaient payables la première année et qu'il n'y avait aucuns frais cachés, ce qui n'est pas le cas. Par ailleurs, la clause contenue dans une annexe du contrat qui renvoie à un catalogue d'hôtels affiliés pour connaître la valeur des points RCI est une clause externe qui n'a jamais été portée à la connaissance des demandeurs. Dans les circonstances, la durée de l'engagement de ces derniers (39 ans) est également abusive au sens de l'article 1437 du Code civil du Québec. Les demandeurs doivent bénéficier de la «présomption absolue de préjudice» établie en leur faveur par la loi. Ils sont en droit d'obtenir la résolution du contrat, le remboursement de la somme payée (10 760 $) ainsi que des dommages compensatoires de 750 $. De plus, vu le comportement insouciant et négligent de la défenderesse, ses nombreux manquements à la loi ainsi que ses antécédents en semblable matière, elle doit payer 4 000 $ à titre de dommages punitifs.


Dernière modification : le 31 août 2017 à 18 h 13 min.