Résumé de l'affaire
Appel d'un jugement de la Cour du Québec ayant rejeté l'action de l'appelante en annulation d'un contrat de vente mais ayant condamné l'intimée à lui payer une somme de 1 000 $ à titre de dommages exemplaires. Rejeté.
Le 6 juillet 1990, l'appelante a acheté de l'intimée une automobile d'occasion dont l'odomètre indiquait 54 565 km. On lui avait assuré que le véhicule n'avait jamais été accidenté, mais elle a appris que cela était faux. Elle a mis l'intimée en demeure de reprendre l'automobile le 21 décembre 1990 et lui a signifié, le 18 février suivant, une action en annulation de la vente dans laquelle elle demandait qu'il soit donné acte à son offre de remettre le véhicule moyennant le remboursement du prix payé. Dans son plaidoyer, déposé le 11 avril 1991, l'intimée a nié les fausses représentations et a plaidé l'impossibilité pour l'appelante de remplir son obligation de remise du véhicule, qui avait parcouru 5 000 km depuis l'achat. L'appelante a d'ailleurs continué à utiliser l'automobile, qui avait, lors du procès, 35 000 km de plus qu'à l'achat. Le premier juge a conclu que l'appelante s'était placée dans une situation qui rendait impossible la remise du véhicule, ce qui la privait du recours en annulation de la vente. Comme il y avait eu dol, il a cependant condamné l'intimée au paiement de dommages exemplaires de 1 000 $, conclusion ayant l'autorité de la chose jugée puisque l'appel de l'intimée de cette partie du jugement a été rejeté.
Résumé de la décision
- le juge Gendreau: La Loi sur la protection du consommateur, qui est d'ordre public, vise à rétablir le déséquilibre contractuel entre un commerçant et son client. L'article 272, qui sanctionne un manquement à une obligation, s'applique en l'espèce, les fausses représentations du vendeur ayant été établies. Selon les interprétations qui ont été faites de cette disposition, il se dégage que le commerçant ne peut offrir la défense d'absence de préjudice subi par le consommateur, que le choix du redressement appartient au seul consommateur, que celui-ci peut cumuler plus d'un remède et que le tribunal peut accorder un remède implicitement inclus dans celui demandé. L'introduction d'une plus grande souplesse dans la procédure ne signifie pas l'exclusion des règles de droit propres à chaque remède. Ainsi, lorsqu'un acheteur choisit l'annulation de la vente et le remboursement du prix payé, il a l'obligation d'offrir au vendeur le bien vendu et de le consigner. La consignation peut être faite après l'offre mais, si elle est tardive, elle doit l'être en temps utile pour permettre au juge de replacer les parties dans leur état originel. Dans ce dernier cas, l'acheteur a l'obligation de démontrer que le bien est dans l'état où il était et, s'il ne l'est pas, d'établir que cela ne lui est pas imputable. Si la dégradation résulte de la faute de l'acheteur, le tribunal peut quand même accorder l'annulation de la vente en réduisant le remboursement du prix. En l'espèce, le premier juge a à bon droit rejeté le recours en annulation de la vente. En effet, l'obligation de consignation n'a pas été respectée puisque non seulement il n'y a pas eu cette consignation du véhicule mais, en parcourant 35 000 km, celui-ci s'est déprécié au point où il ne pouvait plus être rendu en échange du remboursement intégral du prix payé. Une autre solution aurait pu être possible, mais l'appelante a empêché toute conclusion subsidiaire en n'offrant aucun élément de preuve. Le premier juge n'avait donc aucune base pour envisager la diminution du remboursement du prix payé. Lors de l'appel, la situation s'était d'ailleurs encore aggravée puisque l'utilisation de l'automobile s'était poursuivie. La conduite de l'appelante rendait donc impossible toute autre solution que celle adoptée par le premier juge.