Résumé de l'affaire
Appels principal et incident d'un jugement de la Cour supérieure ayant condamné les appelantes Gestion Unipêche et Guérette à rembourser certaines sommes à l'intimée, ayant annulé des quittances signées par l'intimée et ayant accueilli en partie la demande reconventionnelle de Guérette. Accueillis.
Le 10 février 1998, l'intimée et le mis en cause ont accepté de vendre à l'appelante Gestion Unipêche la totalité des actions qu'ils détenaient dans Les Crustacés de Gaspé. Le prix de 3,125 millions de dollars devait être payé le 31 mars suivant, à la clôture de la vente. À la date convenue, l'intimée a reçu 2,925 millions comptant, en plus des 100 000 $ qu'Unipêche avait déjà remis à ses comptables le 10 février. En ce qui a trait aux 100 000 $ que l'intimée avait déposés au compte en fiducie de Blouin & Associés pour garantir ses propres obligations envers Unipêche, l'acte de vente précise qu'ils «représentent dorénavant le paiement de la dernière tranche du prix» (clause no 2.1.3.2.). Or, cette somme ne venait pas d'Unipêche, mais de l'intimée. Le 31 mars 1998, Blouin a signé la convention de fiducie, déclarant erronément avoir reçu d'Unipêche une somme de 100 000 $ qu'il s'engageait à remettre à l'intimée. De son côté, l'intimée a reconnu dans le contrat de vente d'actions avoir reçu 3,125 millions, pour lesquels elle a donné quittance. Par la suite, ayant constaté qu'elle n'avait pas reçu la totalité du prix, elle a demandé la nullité de la clause no 2.1.3.2. Le premier juge a conclu qu'il y avait eu erreur de part et d'autre et il a annulé les quittances. Les appelantes font valoir que l'erreur inexcusable de l'intimée ne constitue pas un vice de consentement (art. 1400 du Code civil du Québec) puisqu'elle découle des documents que l'intimée avait fait préparer. Elles ajoutent qu'en poursuivant Guérette l'intimée n'aurait pas visé la bonne personne, car c'est Blouin qui est partie à la convention de fiducie.
Décision
L'erreur des parties était excusable. Le 31 mars 1998, les discussions au sujet de la vente ont duré plus de 12 heures et, finalement, toutes les parties se sont approprié les documents que l'intimée avait fait préparer pour la vente. En outre, alors que les parties étaient accompagnées de leurs experts, personne n'a décelé l'erreur. Le premier juge a donc eu raison d'annuler les quittances et d'ordonner à Unipêche de payer le solde dû à l'intimée. L'appel principal est accueilli à la seule fin de biffer du dispositif du jugement les mots «avec dépens» pour les remplacer par «sans frais». D'autre part, en poursuivant Guérette, l'intimée visait la bonne personne. En effet, le dépôt était constitué d'une traite bancaire payable à Guérette en fidéicommis et non à Blouin. Guérette était, depuis le début des procédures, une défenderesse au dossier. Elle a fait valoir ses moyens et n'a subi aucun préjudice. Il y a tout de même lieu de corriger l'erreur et de modifier le jugement de première instance en ajoutant le nom de Blouin & Associés à la condamnation contre Guérette. Par ailleurs, le premier juge n'aurait pas dû condamner l'intimée à payer les frais de gestion du compte en fiducie de Blouin. Ce dernier n'a droit à aucun dédommagement pour la conservation en fiducie d'une somme qui devait être remise à l'intimée dès le 31 mars 1998. L'appel incident de cette dernière est accueilli.