Résumé de l'affaire

Appels d'un jugement de la Cour supérieure ayant accueilli en partie une demande en réclamation de dommages-intérêts et des demandes en garantie. Rejetés.
La Ville de Salaberry-de-Valleyfield a retenu les services de CIMA Québec s.e.n.c. afin de rédiger des plans et des devis, d'analyser des soumissions et d'attribuer des contrats pour la construction d'un boulevard. Le contrat d'entrepreneur général a été accordé à Loiselle inc., qui, à son tour, a donné en sous-traitance à Construction N.R.C. les travaux d'enfouissement des conduits d'utilité publique. Or, dans les semaines qui ont suivi, NRC a appris d'un concurrent que son prix était beaucoup plus bas que celui des autres soumissionnaires. De fait, le prix soumis a été calculé par mètre linéaire de conduits, alors que la Ville et CIMA étaient d'avis que l'appel d'offres indiquait un prix par mètre linéaire de massif. Dès ce moment, une mésentente est survenue quant à l'interprétation du devis en ce qui a trait à l'unité de mesure sur laquelle le prix de l'installation des conduits devait être basé. De plus, le début des travaux a été retardé de février à août 2012, car les plans n'étaient pas disponibles et devaient être modifiés. Loiselle et NRC ont donc demandé une compensation. Malgré leur différend sur l'interprétation du contrat, la Ville et CIMA ont insisté pour que NRC procède aux travaux. Cette dernière a accepté, tout en précisant qu'elle maintenait sa position et qu'elle réclamerait la différence entre le prix calculé en mètre linéaire de conduits et celui basé sur des mètres linéaires de massif. Elle a intenté un recours afin de réclamer des dommages-intérêts de 1 260 372 $. La juge de première instance a conclu que la documentation contractuelle était claire et que le prix demandé était fixé en mètre linéaire de massif. Même si NRC a commis une erreur inexcusable lors du dépôt de sa soumission en ne vérifiant pas les plans avant d'établir son prix, la juge a retenu que la Ville et CIMA avaient manqué à leur obligation de bonne foi et fait preuve de réticence dolosive en acceptant la soumission, qui comprenait une erreur substantielle relative au prix. Selon la juge, CIMA est l'ultime responsable de ce dol par réticence. Elle a retenu que le préjudice subi par NRC se limitait à la différence de prix entre sa soumission et celle soumise par le deuxième soumissionnaire ayant déposé la soumission la plus basse, soit 393 992 $. La Ville a aussi été condamnée à payer 7 834 $ à titre de dommages-intérêts résultant du retard sur le chantier.

Décision

La juge n'a pas commis d'erreur en analysant le comportement de la Ville et de CIMA entre la date de l'ouverture des soumissions et celle de l'adjudication du contrat à la lumière des principes énoncés dans Confédération des caisses populaires et d'économie Desjardins du Québec c. Services informatiques Decisionone (C.A., 2003-12-12), SOQUIJ AZ-50211504, J.E. 2004-172, [2004] R.J.Q. 69. C'est à bon droit qu'elle a conclu à l'existence de manoeuvres dolosives. La Ville et CIMA connaissaient l'erreur de NRC et savaient qu'il était impossible qu'elle exécute le contrat au prix soumis. La réticence dolosive et l'intention de tromper proviennent de la mauvaise foi dont a fait preuve CIMA en recommandant à la Ville d'attribuer le contrat à Loiselle alors qu'elle savait pertinemment que les prix étaient dérisoires et qu'ils avaient été soumis par erreur. Enfin, la juge n'a pas erré en déterminant les dommages subis par NRC ni en refusant d'accorder une indemnité à celle-ci pour la perte de profits subie en raison du retard sur le chantier.


Dernière modification : le 15 août 2022 à 16 h 54 min.