Résumé
Appel d'un jugement de la Cour supérieure ayant accueilli en partie une requête introductive d'instance en jugement déclaratoire. Accueilli.
Des agents immobiliers, au nom de l'appelante, ont fait la promotion du projet Ermitage du Lac, à Mont-Tremblant, comme s'il s'agissait d'un investissement dans un hôtel de villégiature. Ils ont remis aux éventuels acheteurs un prospectus qui expliquait que 67 unités de copropriété divise étaient offertes en placement, pour une valeur totale de 23 195 000 $, chacune se composant d'un appartement de l'immeuble en copropriété et de la participation à un programme de location. À la signature de l'acte de vente, chaque acheteur investisseur a également signé de façon concomitante le contrat faisait l'objet du litige, soit un bail d'une durée de 20 ans, comportant une option de renouvellement de 10 ans, auquel était annexé la convention régissant le syndicat de location. Quant à l'acte de vente, il comprend une servitude réelle et perpétuelle appelée «Servitude de syndicat de location», selon laquelle la propriété ne peut être utilisée qu'à titre d'unité d'hôtel de villégiature participant au syndicat de location exploité par l'appelante. Cette dernière soutient que le juge de première instance a erré en concluant que le contrat intervenu entre elle-même et chacun des intimés, copropriétaires d'une unité de copropriété du projet Ermitage du Lac, est un contrat de services au sens de l'article 2098 du Code civil du Québec (C.C.Q.) qui peut être résilié unilatéralement par le client selon l'article 2125 C.C.Q.
Décision
M. le juge Godbout: Pour qualifier le contrat en litige, il faut non seulement s'arrêter à la motivation ou au but poursuivis par l'une et l'autre des parties, mais aussi déterminer quelle est la véritable cause du contrat (art. 1410 C.C.Q.). En l'espèce, la raison pour laquelle les parties ont signé le contrat se trouve à la fois dans la preuve testimoniale et dans la preuve écrite, et plus particulièrement dans le prospectus, le contrat préliminaire, qui démontre l'intérêt des intimés pour le placement proposé, et les actes de vente. En effet, il ressort clairement de la preuve testimoniale que l'appelante et les intimés étaient motivés par la même raison et poursuivaient le même but, soit investir dans l'exploitation d'un hôtel de villégiature. D'autre part, à la lumière des différents documents mis en preuve, l'objet du contrat, soit l'opération juridique envisagée par les parties au moment de sa conclusion (art. 1412 C.C.Q.), était d'inclure leur unité de copropriété divise dans un syndicat de location. La prestation essentielle au coeur du contrat est donc la location par les intimés de leur unité de copropriété à l'appelante afin qu'elle soit comprise dans un syndicat de location, soit le bail. Ce bail, d'une durée de 20 ans, pourrait toutefois être modifié par les parties signataires selon le droit qu'elles se sont réservé, ce qui ne requiert pas la signature de la majorité des propriétaires, contrairement à ce qui s'applique dans le cas de la modification de la convention. La convention régissant le syndicat de location résulte donc de ce bail et en est l'accessoire. Si le but poursuivi par les intimés était uniquement de confier leur unité de copropriété à un gestionnaire pour en assurer la location, ils pouvaient acheter une unité dans un immeuble quelconque et le confier à un gestionnaire de leur choix. Toutefois, ici, c'est différent: les intimés ont investi dans un hôtel de villégiature avec un partenaire, en l'occurrence l'appelante.