Résumé de l'affaire
Appel d'un jugement de la Cour supérieure ayant accueilli en partie une requête pour jugement déclaratoire. Accueilli.
En mai 1992, le sous-ministre adjoint à l'enseignement et à la recherche universitaire écrivait aux vice-recteurs des universités pour leur indiquer que les résidents en médecine paieraient par trimestre les droits de scolarité en vigueur à compter de l'année 1993-1994. Cela était conforme aux Règles budgétaires et calculs des subventions de fonctionnement aux universités du Québec 1993-1994. Se conformant aux exigences du ministre, les doyens ont évalué le programme de résidence à temps plein à 52 crédits. La multiplication du nombre de crédits par le taux unitaire en vigueur donnait le montant des frais de scolarité exigés, qui correspondait à plus du double de l'année précédente. La Fédération des médecins résidents, intimée, a contesté cette tarification des droits de scolarité. Le premier juge a déclaré que la lettre du sous-ministre adjoint ainsi que les «Règles budgétaires et calculs des subventions de fonctionnement aux universités du Québec 1993-1994» constituaient les conditions d'attribution des subventions gouvernementales, et ce, sans nuire aux droits acquis des résidents en médecine qui avaient été admis au programme à compter de juillet 1993. De plus, il a déclaré les augmentations des frais de scolarité abusives et déraisonnables, n'autorisant que l'augmentation de 1,9 % correspondant au coût de la vie et prévue aux règles budgétaires 1993-1994.
Décision
M. le juge Delisle: Dans les années qui ont précédé 1993-1994, le gouvernement a procédé à un nivellement des frais de scolarité en exigeant que les étudiants paient un même taux pour une même période, d'où le système de taux fixe par crédit. Les textes du Ministère sont clairs et précis. On parle de régulariser la situation des résidents et de leur faire payer par trimestre les droits de scolarité réguliers déterminés par l'établissement. «Régulariser» signifie «rendre conforme». Le Ministère désirait que les résidents soient facturés suivant la norme appliquée aux autres étudiants. Les droits de scolarité normaux déterminés par l'établissement sont les frais calculés selon le système du taux par crédit. Il est vrai que l'augmentation est nettement supérieure à 1,9 %. Ce résultat n'est cependant qu'une conséquence de l'objectif visé, soit la modification du mode de facturation.
Par ailleurs, les tribunaux hésitent à intervenir dans le fonctionnement interne des établissements universitaires, sauf s'ils ont agi de mauvaise foi ou de façon déraisonnable, ou encore s'ils ont commis un abus de droit ou un déni de justice. En l'espèce, rien dans la preuve ne permet de conclure que le nombre de 52 crédits soit abusif ou déraisonnable. Il n'est pas du pouvoir de la Cour de déterminer un nombre de crédits qui aurait pu être plus représentatif.
Finalement, une université peut modifier le montant des frais de scolarité en cours de formation. L'exercice des droits découlant de l'admission ne se réalise que par l'inscription, qui, elle, se veut répétitive. Si l'étudiant jouit de droits acquis sur le plan des frais de scolarité, il en jouit uniquement pendant la période couverte par son inscription. L'étudiant est avisé qu'il peut y avoir des changements dans les règlements concernant les droits de scolarité. Le résident s'inscrit chaque année à l'université et le lien juridique qui l'unit à cette dernière se renouvelle d'année en année, avec les modifications apportées par l'université lors de l'inscription. Les universités avaient donc le droit de changer le mode de tarification des frais de scolarité des résidents. Elles ont agi de bonne foi, ne cherchant qu'à respecter les exigences du ministre. À cette fin, elles se sont fiées au travail réalisé plusieurs années auparavant, à la suite duquel il avait été décidé qu'une année de résidence équivalait à 52 crédits.