Résumé de l'affaire

Pourvoi à l'encontre d'un arrêt de la Cour d'appel de Terre-Neuve ayant accueilli l'appel interjeté par l'intimé d'une décision de la Section de première instance de la Cour suprême de Terre-Neuve. Accueilli.
L'article 27 du Règlement sur les mammifères marins interdit la vente, l'échange ou le troc des jeunes phoques du Groenland et des jeunes phoques à capuchon, respectivement appelés blanchons et jeunes à dos bleu. W était titulaire d'un permis de chasse commerciale au phoque délivré en vertu de la Loi sur les pêches et l'autorisant à capturer des phoques à capuchon et des phoques du Groenland. Lors d'une expédition de chasse au phoque en 1996, W a capturé une cinquantaine de phoques, dont un certain nombre de jeunes à dos bleu. Il a été accusé d'avoir vendu des peaux de jeunes à dos bleu, en contravention de l'article 27 du règlement. W a fait valoir que l'article 27 excédait la compétence du Parlement. Le procès auquel ont donné lieu les accusations a été suspendu en attendant l'issue de la contestation constitutionnelle. Le juge de première instance a confirmé que l'article 27 représentait un exercice valide de la compétence fédérale en matière de pêcheries conférée par le paragraphe 12 de l'article 91 de la Loi constitutionnelle de 1867. La Cour d'appel à la majorité a accueilli l'appel de W.

Décision

Mme la juge en chef McLachlin: L'article 27 du Règlement sur les mammifères marins est conforme à la compétence du Parlement en matière de pêcheries. Cet article vise à enrayer l'abattage des jeunes à dos bleu et des blanchons en interdisant leur vente, rendant ainsi leur capture largement inutile. L'objectif du Parlement est de réglementer la pêche au phoque en éliminant la chasse commerciale au blanchon et au jeune à dos bleu, tout en permettant une capture limitée de ces animaux à des fins non commerciales. L'interdiction fait partie d'un régime axé sur «la gestion et la surveillance» globales de la ressource halieutique. Elle vise à restreindre non pas le commerce ou la propriété, mais plutôt une chasse préjudiciable à la viabilité économique de l'industrie de la chasse au phoque et à la ressource halieutique en général. La méthode choisie pour réduire la chasse commerciale au jeune à dos bleu et au blanchon n'est peut-être pas parfaite, mais l'efficacité n'est pas une considération valable dans l'analyse du caractère véritable. De plus, l'argument voulant qu'une mesure législative constituant une interdiction de vente porte nécessairement, de par son caractère véritable, sur la réglementation de la vente confond l'objet de l'article 27 avec les moyens choisis pour réaliser cet objet. D'après le contexte de la mesure législative dans son ensemble et son historique législatif, rien n'indique que le Parlement tentait de réglementer le marché local du commerce du phoque et des produits du phoque. De par son caractère véritable, l'article 27 a trait à la gestion des pêches canadiennes et relève de la compétence fédérale en matière de pêcheries. La compétence fédérale en matière de pêcheries ne se limite pas à la conservation des stocks de poisson, mais s'étend de façon plus générale au maintien et à la préservation de la pêche dans son ensemble, y compris sa valeur économique.

Bien qu'elle soit vaste, la compétence en matière de pêcheries n'est pas illimitée. Le Parlement doit respecter la compétence provinciale en matière de propriété et de droits civils. Pour décider si une matière correspond davantage à un chef de compétence fédérale ou provinciale, on ne peut pas se contenter de tracer une ligne de démarcation entre les compétences fédérale et provinciale, selon qu'il est question de conservation ou de vente. Il faut examiner l'activité en cause afin de déterminer si, de par son caractère véritable, la matière réglementée est liée à la compétence fédérale en matière de pêcheries ou à la compétence provinciale en matière de propriété et de droits civils. En l'espèce, l'article 27 est une mesure fédérale valide étant donné qu'il est essentiellement lié à la protection de la viabilité économique des pêches canadiennes dans leur ensemble. Ce résultat respecte parfaitement le droit constitutionnel des provinces de régir la propriété et les droits civils.

L'article 27 ne relève pas de la compétence fédérale en matière de droit criminel. Bien qu'il comporte une interdiction et une peine, il ne vise aucun objectif de droit criminel valide.


Dernière modification : le 30 juillet 2022 à 20 h 43 min.