Résumé de l'affaire

Appel d'un jugement de la Cour supérieure ayant rejeté une requête en autorisation d'exercer un recours collectif. Requête pour présenter une nouvelle preuve (art. 509 et 1002 du Code de procédure civile (C.P.C.)). Rejetés.

Le juge de première instance a rejeté la requête en autorisation d'exercer un recours collectif contre l'intimé au nom de toutes les personnes dont les informations personnelles se trouvaient dans un ordinateur portable qui a été égaré en février 2013 par l'un des employés de ce dernier. Selon le juge, bien que l'appelant ait établi prima facie la faute de l'intimé, il a omis de démontrer l'existence d'un préjudice indemnisable. La condition relative à l'apparence sérieuse de droit énoncée au paragraphe b) de l'article 1003 C.P.C. n'était donc pas respectée. L'appelant se pourvoit. Il dépose également une requête en vue de présenter de nouveaux éléments de preuve en appel en vertu des articles 509 et 1002 C.P.C. Il s'agit d'une déclaration sous serment d'un membre potentiel du groupe qui aurait été victime d'un vol d'identité en avril 2015 en raison de la perte de l'ordinateur en cause.

Décision

À l'étape de l'autorisation, le juge devait déterminer si les conditions prévues à l'article 1003 C.P.C. étaient respectées, et ce, à la lumière du recours individuel de l'appelant, à titre de requérant. Le fait qu'un membre potentiel du groupe visé par la requête autre que ce dernier puisse prima facie établir l'existence d'un préjudice découlant de la faute de l'intimé n'est pas pertinent afin de déterminer si la condition de l'apparence de droit du recours de l'appelant est remplie. Ainsi, même si les éléments de preuve contenus à la déclaration sous serment soumise au soutien de la requête de l'appelant sont nouveaux, ils ne sont ni indispensables ni requis aux fins de la justice. D'autre part, à l'étape de l'appel, cette preuve ne peut être déposée dans le but de substituer l'auteur de cette déclaration à l'appelant à titre de requérant à la requête en autorisation ou de l'ajouter à titre de corequérant. Au surplus, cela exigerait un amendement à cette requête, ce qui donnerait lieu à une analyse différente du critère prévu à l'article 1003 b) C.P.C. Or, il ne revient pas à la Cour de se prononcer en première ligne sur le respect de l'une des exigences préalables à l'autorisation (Del Guidice c. Honda Canada inc. (C.A., 2007-06-27), 2007 QCCA 922, SOQUIJ AZ-50439488, J.E. 2007-1345, [2007] R.J.Q. 1496). De plus, en ce qui concerne l'exigence prévue au paragraphe b) de l'article 1003 C.P.C., le juge a eu raison de conclure que, malgré la faute de l'intimé, l'appelant n'a pas établi l'existence d'un préjudice moral tangible et susceptible de compensation pécuniaire. Même si certaines des allégations démontrent l'existence de contrariétés, il ne s'agit pas d'un préjudice indemnisable au sens de l'arrêt Mustapha c. Culligan du Canada Ltée (C.S. Can., 2008-05-22), 2008 CSC 27, SOQUIJ AZ-50492888, J.E. 2008-1083, [2008] 2 R.C.S. 114. Bien que la loi n'impose pas un fardeau onéreux à un requérant au stade de l'autorisation, il doit établir l'existence d'une «apparence sérieuse de droit» ou d'une «cause défendable». Toutefois, aussi peu élevé que soit ce seuil, le rôle de filtrage que doit exercer le juge autorisateur demeure et doit être exercé, même si, à cette étape, il ne tranche qu'une question procédurale et ne doit pas se pencher sur le fond du dossier. En fait, ce filtrage est nécessaire pour éviter que les parties défenderesses ne doivent se défendre au fond contre des réclamations insoutenables; telle est la conclusion du juge. En l'espèce, rien ne justifie l'intervention de la Cour.


Dernière modification : le 23 juillet 2022 à 12 h 47 min.