Résumé de l'affaire

Action en réclamation d'une somme de 20 224 $. Accueillie en partie (15 328 $). Demande reconventionnelle en dommages (23 579 $). Accueillie en partie (5 400 $).

La défenderesse, qui s'est adressée à la demanderesse pour faire installer une piscine creusée sur son terrain, a signé, le 5 août 1989, une offre d'achat pour la somme de 15 570 $, en acompte de laquelle elle a versé 500 $. Les parties se sont alors entendues sur un financement pour une période de trois ans avec une institution prêteuse. Les travaux se sont terminés le 28 septembre suivant, à la satisfaction de la défenderesse. Les contrats de financement et de vente à tempérament ainsi que le contrat d'assurance-vie ont été signés le 24 août, à l'insu de la défenderesse et sans son consentement, vraisemblablement par la représentante de la demanderesse. Le 3 novembre suivant, la défenderesse a reçu de la banque prêteuse les documents en question, qui établissaient le prix de vente à 17 220 $ et prévoyaient un financement pour une période de cinq ans au lieu de celle de trois ans prévue dans l'entente originale. Elle a alors communiqué avec la Banque, mais elle a été rabrouée par le représentant de celle-ci à qui elle avait affirmé ne pas être la signataire des documents en question. Par la suite, un rapport d'expertise d'écriture a démontré sans aucun doute qu'il y avait eu fabrication de faux. La demanderesse, sans tenter de corriger la situation ou de s'excuser auprès de la défenderesse, a racheté la créance de la Banque; sans mise en demeure, elle a poursuivi la défenderesse pour le paiement de la somme due aux termes du contrat de vente (16 720 $) et a réclamé également des honoraires d'avocats (3 504 $). La défenderesse, qui s'est sentie lésée par l'attitude de la Banque et de la demanderesse, a répliqué par une demande reconventionnelle en dommages exemplaires (7 500 $), en dommages-intérêts pour atteinte à sa réputation (5 000 $) ainsi qu'en remboursement des frais juridiques engagés (8 680 $) et des frais pour compenser le nouveau financement de 2 500 $.

Résumé de la décision

L'interprétation de la Loi sur la protection du consommateur permet de conclure qu'il s'agit ici d'un contrat assujetti à l'application de cette loi. En effet, le but de la loi est de protéger les consommateurs contre toute pratique commerciale illicite et irrégulière des commerçants. D'autre part, l'installation d'une piscine creusée ne constitue pas une construction d'un immeuble donnant ouverture à l'application de l'exclusion prévue à l'article 6 d) (non en vigueur) de la loi. Il s'agit plutôt d'une amélioration à un immeuble, dont l'ampleur ne permet pas d'exclure l'application de la loi. Par ailleurs, même s'il fallait plutôt soumettre le contrat à l'application de l'article 1683 du Code civil du Bas Canada, comme le prétend la demanderesse, elle aurait dû faire approuver toute modification au contrat pour pouvoir réclamer une somme supérieure à celle prévue dans l'entente originale. Le seul ajout qui peut donc être réclamé est celui pour l'adduction d'eau (250 $), auquel la défenderesse a consenti. En ce qui concerne la demande de remboursement des honoraires d'avocat, peu importe la loi qui doit être appliquée, cette demande doit être rejetée. D'une part, les articles 12 et 13 de la Loi sur la protection du consommateur rendent illégales, parce qu'elles ne prévoient pas de montant précis, les clauses qui visent à faire payer par le client les frais engagés par le vendeur pour faire respecter le contrat. D'autre part, si ce sont les règles du Code civil du Bas Canada qui s'appliquent, la demanderesse devait prouver la nécessité de poursuivre la défenderesse, ce qu'elle n'a pas fait étant donné sa précipitation à poursuivre la défenderesse malgré le fait que sa représentante avait commis un délit important dans ce dossier.

L'article 272 f) de la Loi sur la protection du consommateur prévoit la possibilité d'accorder des dommages exemplaires, ce qui n'exclut pas la possibilité de demander des dommages-intérêts. Il faut alors déterminer s'il y a eu ou non mauvaise foi. En l'espèce, la demande reconventionnelle est fondée sur le fait que les droits constitutionnels de la défenderesse ont été brimés par les faits et gestes de la demanderesse. À cet égard, les articles 4 et 6 de la Charte des droits et libertés de la personne considèrent le nom comme un bien. L'acte illicite de la représentante de la demanderesse a ainsi contrevenu aux droits de la défenderesse, donnant ouverture au recours en dommages exemplaires, et ce, afin de dissuader la demanderesse d'agir comme elle l'a fait. Il y a suffisamment d'éléments pour considérer l'attitude de cette dernière comme intentionnelle car, en plus d'avoir omis d'obtenir la signature de défenderesse, la demanderesse, informée de cette irrégularité, a agi avec une insouciance déréglée et téméraire du respect du droit d'autrui. C'est cet entêtement, cette absence d'ouverture qui font en sorte que cette faute lourde est également intentionnelle. Une somme de 2 000 $ est donc accordée à la défenderesse à titre de dommages exemplaires. De plus, une somme de 1 000 $ lui est accordée pour dommages résultant de l'atteinte à sa réputation, frustration et inconvénients, en plus de 2 000 $ pour frais d'avocats et de 400 $ pour les frais d'un expert.

 


Dernière modification : le 12 janvier 1994 à 14 h 12 min.