RÉSUMÉE DE L'AFFAIRE
Accusation d'avoir contrevenu aux articles 11.2, 11.3, 13, 214.2 et 214.7 de la Loi sur la protection du consommateur. Acquittement.
Le poursuivant reproche à la défenderesse, une entreprise de télécommunications régie par la réglementation fédérale, d'avoir contrevenu aux nouvelles dispositions de la Loi sur la protection du consommateur régissant le contenu des contrats conclus avec des consommateurs. Ces dispositions, entrées en vigueur en juin 2010, ont été adoptées afin de mieux encadrer la sphère de la téléphonie sans fil et d'autres domaines connexes. Elles interdisent certaines stipulations contractuelles relativement à la modification (art. 11.2) ou à la résiliation (art. 11.3) unilatérales de contrats ainsi que celles imposant au consommateur, en cas d'inexécution de son obligation, le paiement de frais, de pénalités ou de dommages-intérêts dont le quantum est fixé à l'avance (art. 13). Pour leur part, les articles 214.2 et 214.7 de la loi font partie d'une nouvelle section intitulée «Contrat à exécution successive de service fourni à distance» (art. 214.1 à 214.11). S'appuyant sur les articles 91 et 92 de la Loi constitutionnelle de 1867 ainsi que sur les principes jurisprudentiels en matière de partage des compétences, la défenderesse soutient que ces nouvelles dispositions de la loi sont invalides ou, subsidiairement, inapplicables et inopérantes à son endroit, en application des doctrines de l'exclusivité des compétences et de la prépondérance fédérale.
RÉSUMÉE DE LA DÉCISION
Selon les principes énoncés dans R. c. Lloyd (C.S. Can., 2016-04-15), 2016 CSC 13, SOQUIJ AZ-51278243, 2016EXP-1224, J.E. 2016-666, [2016] 1 R.C.S. 130, le tribunal n'a pas compétence pour décréter officiellement qu'une règle de droit est constitutionnellement invalide. Il peut cependant se prononcer sur sa constitutionnalité, de manière accessoire à sa compétence en matière pénale. S'il détermine qu'une disposition est invalide, inapplicable ou inopérante en vertu des doctrines constitutionnelles applicables, il peut donc refuser de l'appliquer dans l'affaire dont il est saisi.
Le Parlement fédéral a compétence exclusive pour adopter des lois en matière de télécommunications interprovinciales. Il a confié de larges pouvoirs au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) pour établir des conditions de commercialisation des services de communication. Or, jusqu'à l'adoption du Code sur les services sans fil, en 2013, le CRTC, en vertu de son obligation d'abstention, avait évité de réglementer certaines facettes de la commercialisation des services de communication. La législature provinciale a donc édicté ses propres normes et exigences contractuelles, en vue de les appliquer à l'industrie des communications. Or, les dispositions de la Loi sur la protection du consommateur régissent directement le contenu de la compétence fédérale en matière de télécommunications. Leur application à la défenderesse constitue une atteinte grave et importante au coeur de cette compétence fédérale, et la doctrine de l'exclusivité des compétences les rend ainsi inapplicables à son endroit. Enfin, la défenderesse a aussi démontré que les nouvelles dispositions sont inopérantes à son égard en vertu de la doctrine constitutionnelle de la prépondérance fédérale. Elles régissent les conditions de commercialisation des télécommunications sans égard à la volonté explicite du fédéral de limiter la réglementation aux seuls cas où cela est nécessaire et sans tenir compte des facteurs, des exigences et des contingences imposés au CRTC. Cet empiétement est suffisamment important pour constituer une entrave.
NDLR
Les mêmes motifs s'appliquent à la décision rendue dans le dossier 500-61-448317-165, diffusée à SOQUIJ AZ-51587161.